journal de ChicoineL

Huit heures, le matin sur le terrain de golf, un brouillard intense.
Le soleil essaie de réchauffer l’atmosphère, de se frayer un chemin.
Nous attendons le départ.
Ces mille gouttelettes m’attirent.
Que s’est-il passé cette nuit?
Elles étaient une ou plusieurs ?
On dirait une fuite, une poursuite, une urgence…
Brouiller le chemin,
Pour sauver qui ?
Sa peau ?...
1er septembre 2013.
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L’heure de pointe me fascine. Surtout le soir, quand les gens retournent à la maison.
À l’intersection, j’admire notre savoir-faire automate. Je nous admire de nous laisser mener par les feux de circulation.
Feux verts, le flux des voitures s’élance dans une direction, tout le monde suit à la queue leu leu, les autres attendent leur tour, impatients, fébriles, à l’affût. On sent quelques personnes plus pressées, si elles pouvaient passer par-dessus…
Tourne à gauche.
Tourne à droite.
La lumière rougit, tout s’arrête.
Au tour des piétons de s’élancer au centre de ce ballet.
Inlassablement tout recommence.
3 septembre 2019.
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Je revenais à la maison. Une voix intérieure me disait, c’est ici que tu es le mieux. De l’entrée, je me mis à regarder cet endroit décloisonné comme je ne l’avais jamais fait. Il éclatait de soleil. Les chats s’étalaient sur les causeuses, heureux de cette chaleur hivernale. De la lumière, partout de la lumière. Impossible de manquer les livres éparpillés, le film de poussière sur la table du centre, le piano silencieux appuyé au mur, les tableaux désalignés par je ne sais quel tremblement de terre.
Côté rue, les enfants s’en vont à l’école, côté cours, les écureuils se poursuivent sur le fil électrique. Près de la porte patio, la table lieu de toutes les rencontres. Je me souviens du temps où les enfants apportaient cahiers et crayons pour y faire leurs travaux scolaires. Pourtant, chacune avait son bureau dans sa chambre pour travailler. Moi, j’étais dans la cuisine à préparer le repas du soir et elles, tout près, à faire leurs devoirs. Une question, une réponse, calme, silence. Après une journée d’école ou une journée de travail, c’était bon comme une brise chaude d’été. Le soir venu, tous les quatre nous mangions, nous parlions autour de cette table. Sans le savoir, nous avions inventé le cocooning.
28 janvier 2019
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Son miroir et sa pince à épiler à la main, elle se dirige vers une fenêtre pour profiter de la lumière. Elle se place dos à la fenêtre et se regarde dans son miroir avec attention. Elle passe sa main sous son menton, incline le miroir, cherche l’angle. Le voici, ce poil qui agace ses doigts. Est-il seul ? Nouvelle inspection : son pouce se promène, inspecte son menton. Elle hésite et elle fait volte-face. Difficiles à voir ces poils… Finalement, elle abandonne psyché et pincette.
1er septembre 2019
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Une coupe de cheveux s’impose. Je me présente au salon de coiffure dix minutes avant le rendez-vous de 16 :30. Je ne sais pas qui me coupera les cheveux, Marie-Christine ne travaille plus là. Quand je me présente à la réception, je sens un malaise. Il y a plusieurs personnes qui attendent. Le lundi, les effectifs sont réduits.
J’essaie de deviner qui fera le travail. Je reconnais un des coiffeurs que je croise d’habitude. Il me regarde. Son fauteuil est tout juste en face de l’espace d’attente. Il nettoie ses instruments de travail en me jetant un coup d’œil insistant. Il nettoie avec application. Je me dis que sa journée tire à sa fin. Ce ne sera certainement lui l’heureux élu. Je sens dans ses gestes de la provocation. Dix minutes plus tard, je suis toujours à attendre. Et lui accueille avec emphase et haute voix, une jeune cliente qui vient d’arriver avec ses parents…
Il aurait eu le temps…
On m’assigne une certaine Caroline qui me traite avec humeur. En moins de dix minutes, elle a fait le travail. Sans un mot ou presque.
Quand je repasse devant l’autre, il me sourit, hoche la tête…
26 août 2019.